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Approfondissements / Les livres

Peyredragon : Et dans les livres, alors ?

Peyredragon : Et dans les livres, alors ?

Depuis des années, fans de la saga et de la série s’interrogent : quand Daenerys reviendra à Westeros, où débarquera-t-elle ? La série vient de livrer sa réponse, elle a choisi « Dragonstone » (en vo), traduit par « Peyredragon » en vf.

La Garde de Nuit vous propose cet article, pour voir quels éléments des livres, concernant Peyredragon, ont été conservés dans la série, et ce qui n’y est pas, mais également pour s’interroger : Peyredragon est présenté comme un lieu de débarquement évident dans la série, mais est-ce si simple ?

Illustration de couverture par Kimberley Pope.

Crédits HBO – Peyredragon dans la série

Peyredragon dans les livres

Si vous regardez attentivement la série, vous vous souvenez sans doute de Peyredragon, que vous associez à Stannis Baratheon. Il y a en effet stationné pendant les saisons 2 et 3. Mais dans les livres, l’histoire et la symbolique de Peyredragon sont bien plus développés.

Le lieu

Crédit Ted Nasmith – Peyredragon (l’image sur son site)

Peyredragon est une île, principalement constituée d’une montagne volcanique, Montdragon, qui fume encore par moment. La montagne est parcourue de tunnels, dans lesquels on trouve de gros morceaux d’obsidienne. Le nom désigne aussi la forteresse isolée et austère qui se dresse au flanc de la montagne. Elle est construite dans du basalte, une roche volcanique noire. Au pied de la forteresse se trouvent une petite ville et un port.

L’impressionnante forteresse de Peyredragon toute entière est un hommage aux dragons. Elle est protégée par trois rangées de murailles flanquées de tours, et garnies d’effrayantes gargouilles, sculptées à l’image de cerbères, vouivres, griffons, manticores, cocatrix, basilics, minotaures et autres démons. Les tours d’angle elles-mêmes figurent des dragons.

Pour rentrer dans la grande salle, il faut passer des portes rouges enfoncées dans la gueule d’un dragon. Cette salle prend elle-aussi la forme d’un dragon allongé, alors que les cuisines ont l’aspect d’un dragon roulé en boule, les fumées des fourneaux sortant par ses nasaux. La forge et l’armurerie sont recouvertes par d’immenses ailes de pierres.

En haut du donjon central de Peyredragon, appelé tour Tambour, on trouve la salle de la table peinte : une vaste pièce ronde, aux murs de pierres, percés de quatre meurtrières en ogive dans la direction des points cardinaux. Au centre de cette pièce, se trouve la table peinte : une bille de bois sculpté sur ordre d’Aegon Targaryen, futur premier roi de la dynastie Targaryen. Longue de quinze mètres et large de sept mètres au maximum, elle représente Westeros. Tout y est représenté, le relief, les villes, les rivières, etc. sauf les frontières entre les Sept Couronnes. La Table a été façonnée avant qu’Aegon n’entame la conquête de son futur royaume, qui lui vaudrait son surnom de « Conquérant ».

Une légende voudrait que Peyredragon abrite toujours une cache d’œufs de dragons. Une autre légende prétend que les statues des Sept du septuaire de Peyredragon furent sculptées dans les mâts des navires à bord desquels les premiers Targaryen étaient arrivés sur l’île. Au cours des siècles, elles furent peintes et repeintes, dorées, argentées et serties de joyaux. Ainsi l’Aïeule acquit des yeux de perle et le Père une barbe d’or. C’est dans ce septuaire qu’Aegon se serait abîmé en prières le jour précédant son appareillage pour conquérir les Sept Couronnes. Cette légende semble toutefois sujette à caution, Aegon n’ayant jamais été un homme pieux.

L’histoire

De Valyria à Peyredragon

Si l’architecture Peyredragon rappelle autant les dragons, c’est parce que la forteresse a été édifiée par les Valyriens. Les habitants de Valyria sont les seuls, dans l’histoire du monde connu, à avoir élevé et domestiqué des dragons. Grâce à eux, ils étendirent leur empire sur une grande partie d’Essos. Les peuples conquis devenaient des esclaves, qui travaillaient dans les mines. Valyria devint réputée pour l’acier valyrien, un alliage de métaux, permettant de créer des épées plus solides.

Seule une quarantaine de familles disposaient de dragons, ce qui faisait d’elles une aristocratie puissante au sein du régime politique valyrien. Les Targaryen n’était qu’une des maisons mineures parmi ces seigneurs-dragons.

Peyredragon n’était alors qu’un avant-poste, situé aux confins occidentaux de l’empire Valyrien. Plus de quatre siècles avant la saga (soit environ 125 ans avant la Conquête d’Aegon), Aenar Targaryen vendit tous ses biens et emmena dans la forteresse ses femmes, ses enfants, sa famille, ses esclaves et les cinq dragons Targaryen de l’époque. Ses rivaux valyriens jugèrent qu’il se comportait en couard, en fuyant l’empire. En réalité, Aenar voulait échapper au cataclysme à venir, dont sa fille, Daenys, l’avait averti grâce à ses dons de voyance.

Une douzaine d’années plus tard, en l’an -114 avant la Conquête, un déluge de feu s’abattit sur Valyria. Personne n’en connaît la cause, mais il est possible que les quatorze volcans entourant Valyria soient tous entrés en éruption au même moment. En un jour, la fabuleuse cité fut balayée, les terres calcinées, les seigneurs-dragons et leur montures brûlés.

Mis à part les Targaryen, aucune maison de seigneur-dragon ne survécut durablement.

Le berceau des rois-dragons

Pendant le siècle qui suivit, les Targaryen demeurèrent à Peyredragon. Ils s’impliquaient épisodiquement dans les conflits entre les cités libres d’Essos, sans se préoccuper de Westeros. Aegon Targaryen participa même à une bataille contre Volantis, où il brûla les bateaux de la cité grâce à son dragon, Balerion.

La position stratégique de Peyredragon permit aux Targaryen et aux maisons alliées de contrôler les allées et venues des marchands passant par la baie de la Néra. Mais Aegon avait d’autres ambitions, et c’est depuis Peyredragon qu’avec ses deux sœurs, Visenya et Rhaenys, il lança la Conquête des Sept Couronnes. En deux ans, il devint roi et unifia les royaumes, jusqu’alors ennemis.

Aegon préféra alors fonder une nouvelle capitale, Port-Réal à l’endroit même où avait commencé sa conquête, plutôt que d’installer son trône à Peyredragon. Pourtant, il garda une préférence pour le climat familier de l’île sur laquelle il résidait une bonne partie de l’année, notamment durant ses dernières années. Il y mourut après 37 ans de règne.

La dynastie des Targaryen

Attention, le paragraphe suivant dévoile des évènements de la Danse des Dragons racontés dans Feu et Sang, évènements qui sont et seront adaptés dans la série House of the Dragon.

Spoiler:
Pendant les trois cents ans où la dynastie des Targaryen régna sur les Sept Couronnes, le fief ancestral de Peyredragon devint la demeure du prince héritier, titré « Prince de Peyredragon ». Le fief conserva des vassaux propres, appelés les seigneurs du détroit. On compte parmi eux les maisons Velaryon, Celtigar, Bar Emmon et Solverre.

Sur l’île, les habitants percevaient les Targaryen comme des quasi-dieux et on raconte que certaines pucelles s’offraient volontiers à eux. Si s’ensuivait la naissance d’un enfant naturel, surnommé « semence de dragon », cela était perçu comme une bénédiction. Grâce à cette ascendance, certaines « semences de dragon » purent même domestiquer et monter des dragons.

Les abords de Peyredragon furent hantés pendant des années par quelques dragons, retournés à l’état sauvage. Le plus célèbre étant le Cannibale, qui ne fut jamais dompté. Les autochtones croyaient qu’il habitait sur l’île avant même l’arrivée des Targaryen. À l’exception de ce dragon, qui dévorait des jeunes spécimens de son espèce, les autres dragons sauvages se nourrissaient de poissons ou des moutons de l’île.

Pour les Targaryen, Peyredragon servit bien souvent de refuge. En l’an 41, une rébellion urbaine enflamma la capitale, obligeant le roi et sa famille à y retourner. En l’an 129, en plein conflit de succession appelé « Danse des Dragons », la princesse de Peyredragon, Rhaenyra Targaryen s’enfuit de Port-Réal et croit pouvoir trouver abri à Peyredragon, ignorant que son demi-frère rival, le roi Aegon II s’y trouvait déjà. L’ayant capturée, il la fait dévorer par son dragon, sous les yeux de son fils, le futur Aegon III.

Peyredragon sera également le refuge des derniers Targaryen avant leur chute.

La rébellion de Robert Baratheon

Lorsqu’arrive à Port-Réal l’annonce de la défaite du Trident, où Rhaegar Targaryen a été défait et tué par les troupes du rebelle Robert Baratheon, le roi Aerys II le Fol envoie son épouse Rhaella, enceinte, et son fils Viserys en sécurité sur Peyredragon. En naissant, Daenerys Targaryen provoque la mort en couches de sa mère pendant un violent orage, qui lui vaudra son premier surnom : Daenerys du Typhon (Stormborn). La tempête est telle que la flotte targaryenne est détruite et les murs de Peyredragon sont endommagés.

Après la prise de Port-Réal et la mort d’Aerys, Robert Baratheon, qui veut détruire définitivement la maison Targaryen, envoie son frère Stannis assiéger Peyredragon avec une flotte. Mais le fidèle ser Willem Darry parvient à s’enfuir avec Viserys et Daenerys pour Braavos.

Robert confie alors la forteresse de Peyredragon à Stannis, qui y installe sa maisonnée. Il est titré « lord de Peyredragon » et non-plus « Prince de Peyredragon », comme à l’époque des Targaryen. Lord Stannis devient également maître des navires, responsable de la marine royale, et membre du conseil du roi.

Dans la saga

La mort de la Main du roi Robert, Jon Arryn, prive Stannis Baratheon d’un allié précieux dans la lutte sourde qui l’oppose alors aux Lannister. Il se retire à Peyredragon et y amasse les troupes de ses vassaux, soit environ trois mille hommes. Tous les navires arrivant dans l’île sont consignés au port sur son ordre. Après la mort de son frère Robert, Stannis proclame l’illégitimité au Trône de Fer de Joffrey et fait connaître ses propres prétentions, mais, à part ses propres vassaux, personne ne rejoint ses rangs.

La prêtresse de R’hllor, Mélisandre d’Asshai, lui promet l’intervention de son dieu s’il renonce à ses anciennes idoles. Stannis autorise alors les fidèles de R’hllor à détruire le septuaire de Peyredragon. Ils brûlent ensuite sur la plage les statues antiques des Sept, et Mélisandre retire du brasier une épée rouge, qu’elle prétend être Illumination, l’épée des héros. Sa garde est ornée d’un gros rubis carré et sa lame flamboie d’un éclat rouge, jaune ou blanc, troublant l’air autour d’elle. Elle l’offre à Stannis et elle proclame qu’il est la réincarnation d’Azor Ahai, le Guerrier de la Lumière.

Stannis quitte alors Peyredragon avec sa flotte et ses troupes. Il parvient à conquérir Accalmie, la forteresse des Baratheon, mais il est défait devant Port-Réal par les Lannister et les Tyrell. Il retourne se réfugier à Peyredragon, sachant que ses ennemis n’ont pas la flotte nécessaire pour le poursuivre dans l’immédiat.

Mélisandre prétend qu’elle peut réveiller les dragons de pierre de Peyredragon grâce au sang de roi, pour les mettre au service de Stannis. Mais, pour obtenir ce sang, il doit sacrifier et brûler Edric Storm, un des bâtards de son frère Robert, confié à sa garde. Davos Mervault, révulsé à l’idée de cette ignominie et craignant que le roi ne cède à la pression des adeptes de R’hllor, fait s’enfuir le jeune homme.

Sur le conseil de Davos, Stannis part alors pour le Mur afin d’y secourir la Garde de Nuit, ne laissant semble-t-il à Peyredragon qu’une garnison symbolique, commandée par le bâtard de Séréna, ser Rolland Storm. Apprenant auprès de la Garde de Nuit que l’obsidienne est une faiblesse des Marcheurs blancs, Stannis envoie l’ordre au gouverneur de Peyredragon d’extraire tout l’obsidienne qu’il pourra des tunnels sous le château. Toutefois, Stannis ne se fait pas d’illusion : Peyredragon ne sera plus à lui très longtemps.

En effet, La flotte Redwyne, des vassaux des Tyrell, assiège ensuite la forteresse pour le compte du Trône de Fer. Cersei Lannister, manœuvrant pour éloigner ser Loras Tyrell de la capitale, lui remet le commandement des assiégeants, avec mission de prendre la forteresse. Ser Loras se montre trop téméraire : il provoque un terrible bain de sang, au cours duquel il perd de nombreux soldats. Il est lui-même grièvement blessé par de l’huile bouillante, et on ignore depuis s’il a survécut à ses blessures. Mais la place est prise, et les troupes des Tyrell fouillent le château, sans y trouver ni richesse, ni la légendaire cache d’œufs de dragon.

Voila où s’en sont arrêtés les livres.

Le débarquement de Daenerys

Dans la série, Daenerys débarque donc à Peyredragon. Dans les livres, elle n’a toujours pas quitté Essos. Qu’est-ce qui justifie les choix de la série ? Les livres proposeront-ils la même chose ?

Voguant depuis la baie des Serfs, Daenerys a plusieurs points de débarquements possibles au sud et à l’est de Westeros : les côtes du Bief, de Dorne ou des terres de l’Orage, le fief ancestral des Baratheon.

Le trajet de Daenerys depuis la baie des Serfs, et les possibilités de débarquement qui s’offrent à elle (Crédit La Garde de Nuit)

Le Bief

Lord Mace Tyrell et les seigneurs du Bief ont été parmi les derniers à se rallier à Robert Baratheon, lorsque celui-ci a renversé le père de Daenerys, le roi-fou Aerys II. Le Bief est une région particulièrement riche, surtout en nourriture : on imagine bien qu’après une longue traversée, les troupes de Daenerys ont besoin de se ravitailler avant de songer à une conquête.

Toutefois, dans les livres, l’alliance des Tyrell avec les Lannister rend cette option périlleuse pour Daenerys. Et même si dans la série, la dernière des Tyrell s’est jointe à elle, ce choix implique un grand détour. Les troupes de Daenerys perdraient beaucoup de temps (et peut-être aussi des soldats) pour un profit négligeable. Sans parler des risques accrus de tempêtes… Et, une fois débarquées, il leur faudrait encore traverser tout le continent dans sa largeur pour marcher sur Port-Réal.

Dorne

Dorne semble un choix plus logique. La principauté est pauvre et désertique, mais elle est aussi le territoire le plus proche de Meereen. Les Dorniens sont nombreux à en vouloir aux Baratheon et aux Lannister pour le meurtre de la princesse Elia Martell, belle-sœur de Daenerys, et pour celui, encore plus récent, du prince Oberyn Martell. Qui plus est, Daenerys bénéficierait d’un prestige symbolique : un mythe veut que les Dorniens actuels soient les descendants d’un peuple arrivé à bord de mille bateaux, conduits par une princesse guerrière. Enfin, plus marginalement, le rattachement de Dorne aux Sept Couronnes s’est concrétisé, plus d’un siècle avant la saga, par le mariage du prince régnant de Dorne avec une princesse targaryenne prénommée Daenerys…

Toutefois, le bon accueil des Dorniens n’est pas garanti (en tout cas, dans les livres ; dans la série, tout Dorne semble contrôlé par Ellaria Sand, alliée de Daenerys). En outre, la principauté étant le territoire le moins peuplé des Sept Couronnes, ce n’est pas un allié « suffisant ». Enfin, l’inconvénient majeur de ce choix serait de savoir comment remonter jusqu’à Port-Réal : la route est longue, le ravitaillement difficile et le désert de Dorne se prête mal aux mouvements de troupes importantes. Il faut également franchir les montagnes qui séparent la principauté du reste de Westeros, avant d’aboutir aux terres de l’Orage, fief des Baratheon.

Les terres de l’Orage et les terres de la Couronne

Les terres de l’Orage constituent le dernier choix possible, et sans doute le plus logique : proches de Port-Réal, relativement prospères, et sans suzerain charismatique ou famille suzeraine ancestrale susceptible d’animer une résistance locale (les Baratheon ayant soit disparu, soit été « absorbés » par les Lannister). Les terres de l’Orage, comme les terres de la Couronne, toutes proches, se prêtent donc bien à un débarquement qui aboutirait à une reconquête rapide. Trois points de chute sont possibles : Accalmie (forteresse ancestrale des Baratheon, réputée inexpugnable), Port-Réal (capitale des Targaryen, puis des Baratheon) ou Peyredragon (forteresse ancestrale des Targaryen). En investissant une de ces trois places, Daenerys commencerait par un coup d’éclat, qui donnerait un excellent départ à sa conquête.

En conclusion…

Pour l’instant, il n’est pas dit que la Daenerys des livres parviendra un jour à se lancer à la conquête de Westeros. Mais, si elle y arrive, il est possible qu’elle suive l’exemple de la Daenerys de la série et qu’elle débarque à Peyredragon, d’abord pour les raisons évoquées par Jaime : il y a un port, capable d’accueillir une bonne partie de ses navires, elle y est née, et la position de l’île en fait une excellente base pour la conquête de Westeros (on peut toutefois supposer qu’elle y sera « accueillie » par une garnison, plutôt que de trouver une place déserte, comme dans la série). Il existe également des raisons plus symboliques : son ancêtre, Aegon, partit de Peyredragon pour lancer la fameuse Conquête, qui lui permit de régner sur les Sept Couronnes et de faire des Targaryen la lignée royale de Westeros. Lui aussi avait conquis Westeros avec trois dragons, et celui qu’il chevauchait était nommé Balerion, la Terreur noire, tout comme Daenerys, qui chevauche Drogon, le dragon noir.

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