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Sept raisons qui nous rendent circonspects pour House of the Dragon

Sept raisons qui nous rendent circonspects pour House of the Dragon

House of the Dragon arrive très bientôt sur nos écrans… Entre attente impatiente et craintes légitimes, on vous donne sept raisons qui nous font un peu redouter la série… Plus qu’une semaine et on sera fixés !

Des clichés à la peau dure

Les clichés ont la peau dure ! Clichés sur la narration, sur l’histoire, sur les cultures, sur les genres, etc… ils façonnent en grande partie nos représentations et notre imaginaire, et certains peuvent se révéler pour le moins questionnant, voire problématiques.

C’est le cas d’un bon nombre de clichés associés à la sexualité des femmes – régulièrement présents dans Game of Thrones qui avait largement été critiquée pour cela. Le terme de « sexposition », qui qualifie les scènes à contenu sexuel totalement gratuites avec pour seul objectif d’attirer le spectateur (masculin) qu’on trouve surtout dans les premières saisons – et qui résulte en une objectification des femmes – avait même été inventé pour la série ! Les violences sexuelles ont aussi été épinglées, moins pour leur existence, que pour la façon dont elles ont été dépeintes : minimisées (le viol de Cersei par Jaime), victime effacée ou viol transformé en quelque chose de « positif » (le viol de Sansa, qui lui a « permis » de se construire comme femme forte), justifiées par le côté « historique » de la série (« oui, vous savez, à l’époque ça se passait comme ça, donc on doit le mettre » … Please, est-ce qu’on peut arrêter avec cet argument ? Game of Thrones est une fiction médiévalisante, mais ce n’est ni le Moyen Âge ni une autre période historique), … tant d’idées reçues et de représentations que l’on espère ne pas revoir dans House of the Dragon.
Bon, c’est loupé pour le dernier point, Miguel Sapochnik ayant déjà brandi le sceptre de l’argument historique… (nope, ça ne fonctionne toujours pas). L’équipe de production semble toutefois consciente d’un bon nombre d’aspects problématiques et éculés de la représentation des violences sexuelles et de la sexualité, à l’image de Sara Hess ; encore que certains points de son intervention me laissent circonspecte… Bref, une dépiction que j’appréhende et je ne sais sur quel pied danser.
Parmi les autres clichés associés à la sexualité féminine, je crains aussi de voir l’image (trop) habituelle de la femme qui soit manipulatrice par le biais de la sexualité ou de son corps en général (hey coucou Mélisandre), clichés qui peut d’autant plus facilement arriver que le scénario de cette première saison sera très axé sur les relations familiales autour d’une lutte pour le pouvoir.

D’autres clichés ont également l’air de pointer le bout de leur nez : ceux associés à l’orientalisme. Nous verrons la Triarchie dans House of the Dragon – une alliance de cités d’Essos -, et les Orientaux avaient été assez maltraités et caricaturés dans Game of Thrones (dans le Trône de Fer aussi, mais c’est plus complexe et c’est un autre sujet). Seront-ils réduits à l’image d’Epinal de l’Oriental avec des intentions d’invasion de l’ouest ? Faisant preuve d’une cruauté indicible et de despotisme ? De poison et de magie ?
Sur l’Orient également, le fait de caster Sonoya Mizuno, une actrice anglo-japonaise, pour incarner Mysaria le Ver Blanc, une prostituée et maitresse des chuchoteuses venant de l’Est, soupçonnée de pratiquer des arts mystiques, cela peut faire lever un gros sourcil tellement cela reprend un certain nombre d’images orientalistes.
Les bonnes intentions ne débouchent pas nécessairement sur de bonnes représentations, mais nous verrons bien ce que donnera la série, et on espère qu’ils éviteront ces écueils.

Babar des Bois

Faire un choix

Feu et Sang, livre d’histoire fictive des Targaryen, a la particularité d’être constitué de chroniques écrites par un narrateur fictif ayant vécu dans l’univers de l’œuvre, qui s’appuie lui-même sur différentes sources historiques (fictives, vous l’aurez compris). Ces sources sont souvent subjectives, chacune pouvant avoir ses biais (certaines plus que d’autres). Chaque histoire, chaque évènement, peut avoir autant de versions qu’ils auront de chroniqueurs pour les raconter.

La confrontation des versions selon les sources crée de l’humour ainsi que du mystère dans Feu et Sang. Par exemple, le bouffon Champignon, au service des Targaryen, est une source fréquemment invoquée pour sa proximité avec les protagonistes, et ses versions sont bien souvent scandaleuses et subversives (et sûrement, par la même occasion, éloignées de la vérité).

Pour la série House of the Dragon, les scénaristes ont déjà indiqué qu’ils avaient fait leur choix sur la version à présenter. Outre le fait que cela retire de la subtilité au récit par rapport à l’œuvre originelle, comment faire un choix entre différentes versions quand personne ne sait quelle est la vérité ?

L’histoire a montré que dans le domaine de faire des choix d’écriture pour une adaptation d’une œuvre de George R. R. Martin, tout n’a pas toujours été glorieux.

Schrö-dinger

À l’abordage !

Bandes-annonces, teaser, leaks (plus ou moins réels), photos promotionnelles, interviews, affiches… si l’on a échappé à un clip à la mi-temps du Super Bowl, c’est bien là le seul créneau que l’équipe de production n’a pas exploité pour faire la promotion de leur série. Même GRRM a été ressorti de sa boite pour l’occasion !
Après la naufrage de la saison 8, HBO semble vouloir remettre à l’eau sa licence phare (comprendre, celle qui lui rapporte le plus) avec toute la subtilité qu’on lui connait.
Un tel tsunami médiatique pour une série qui, du moins dans ses premières saisons, n’aura pas la portée de GoT, me fait craindre le pire. En effet, cette stratégie est risquée. D’abord, quelle surprise laisse-t-on aux spectateurs ? L’histoire est déjà toute tracée par Feu et Sang, voilà qu’HBO dévoile une grande partie du visuel et de l’ambiance de la série. L’impression de « déjà vu », inhérente à tout spin-off, sera ici décuplée. De plus, l’excitation des premières annonces a désormais fait place à un sentiment d’indigestion et l’apriori positif que j’avais sur ce renouveau de la licence a pris le large depuis longtemps.
À titre personnel, je crains que toute cette mise en avant ne soit un présage d’un all-in sur les CGI et la musique épique, au détriment d’une construction narrative de qualité.

Loin de moi l’idée de vouloir absolument tirer à boulets rouges sur une série encore à venir, et peut être qu’House of the Dragon nous réservera une inattendue bonne surprise. Reste que la pression que se met elle-même la production n’est pas pour me rassurer.

Ezor

L’histoire tourne comme une roue

L’histoire tourne comme une roue, la nature humaine est fondamentalement immuable. Ce qui s’est déjà produit se reproduira encore.
A Feast for Crows, archimestre Rigney

George R. R. Martin nous a annoncé la couleur : l’histoire se répète, puisque le cœur des hommes et femmes est inchangé. De facto, Feu et Sang, livre d’histoire fictive de Westeros dont House of the Dragon est adaptée, fait en grand partie écho à la saga principale. Les mêmes causes entraînent les mêmes conséquences. Les mêmes tensions naissent chez les personnages, puisque, comme aime à le dire l’auteur régulièrement en citant Faulkner, « le cœur humain en conflit avec lui-même est la seule chose qui mérite d’être écrite ». Et, vous le verrez si vous lisez Feu et Sang, bien des personnages de la Danse des Dragons sont en fait des miroirs de nos personnages favoris. Rhaenyra Targaryen rappelle beaucoup Cersei Lannister par certains aspects, Otto Hightower tient du Tywin Lannister, Viserys Targaryen et Robert Baratheon seraient très potes tant ils se ressemblent…

Feu et Sang reprend donc bien des éléments de la délicate recette de la saga du Trône de Fer. La recette est bonne… mais a t-on vraiment envie de remanger exactement le même plat à la télé, avec uniquement un dressage légèrement différent ? La série House of the Dragon risque vite, si les scénaristes n’innovent pas un peu, de se retrouver n’être qu’une resucée de la série mère. Espérons que ce ne soit pas le cas !

Nymphadora

Une série pseudo-historique sans souffle ?

House of The Dragon est inspirée de la « fausse histoire » des Targaryen, comme le dit George R. R. Martin.
Tout comme les séries historiques, ce que je redoute ici, c’est qu’on s’ennuie un peu. Souvent, les productions de ce type ont un ton assez superficiel et brassent tellement de temps que les situations peinent à s’exposer, les ambiances n’ont pas le temps de se développer et les personnages manquent de corps. On peut évidemment compter sur George R. R. Martin pour donner un peu plus d’épaisseur à la chose et aux dragons pour nous divertir, mais j’ose espérer que si Feu et Sang était un livre de « fausse histoire », House of the Dragon ne sera pas juste « les Tudors avec des dragons ».

Crys

Un héritage G(r)OTesque

Ce n’est jamais facile de retourner vers quelque chose que l’on a beaucoup aimé. Tenez, moi je suis retourné à la maternelle, ben le mur que l’on se défiait d’escalader m’arrive à la taille, la maîtresse que j’adorais a subi le burnout de trop et la fille trop belle dont je rêvais de tenir la main m’a -encore- mis un râteau. C’est pareil pour les films, séries ou même albums de musique mythiques. Les fans et même le public « lambda » gardent des souvenirs et des attentes parfois impossibles à combler. Si beaucoup seront ravis de retrouver ou découvrir Westeros, il sera difficile de bien doser la nostalgie et de répondre aux besoins divers et variés. Je suis sûr que vous avez toutes et tous des souvenirs de suites ou préquelles qui vous ont déçus (je ne vais pas en citer pour ne pas lancer de débat ).

La Warner et HBO mettent beaucoup d’argent et d’ambition dans la série pour en faire l’héritière de Game of Thrones, voir la première d’une lignée de séries dérivées. Autant c’est rassurant en terme d’ambition, autant le risque est grand de vouloir minimiser la prise de risque pour se contenter de grand spectacle. Certes, il sera là vu les moyens mis en œuvre, mais là aussi, l’héritage est lourd. Les dernières saisons de Game of Thrones ont montré que de belles images et des scènes spectaculaires ne faisaient pas tout. Personnages abandonnés ou incohérents comme le Roi de la Nuit et Daenerys, intrigues en carton dignes de la téléréalité, armées qui « popent » et se téléportent comme dans un mauvais jeu vidéo, sujets de société abordés de manière bâclée et choquante comme dit ci-dessus… Autant la série était un incontournable de toutes les discussions à ses débuts, autant elle est tombée de son piédestal sur sa fin. House of the Dragon a tous les bons ingrédients, mais est-ce que la production et l’équipe nous préparent un festin, du réchauffé ou est-ce que cela sentira carrément le cramé de fond de casserole..?

Pandémie

Un casse-tête pour donner vie aux nouveaux personnages

George R. R. Martin aime à le répéter : les meilleures histoires sont celles qui tournent autour des personnages. Et c’était d’ailleurs une des grandes forces des premières saisons de Game of Thrones : des personnages nombreux, rapidement identifiables pour les importants, et avec une finesse d’écriture assez rare. En soit, avec un casting aussi fourni, les premières saisons devaient être impeccables sur la caractérisation physique et psychologique de leurs personnages, et le moins que l’on puisse dire c’est qu’elles l’étaient. Prenons l’exemple de la famille Stark, la famille comptant le plus de protagonistes principaux. Elle disposait de 9 personnages en saison 1, et on ne s’y perdait pas, en partie parce que chacun d’entre eux se basait sur des archétypes assez connus et identifiés des familles nombreuses fonctionnelles en fiction – la mère protectrice et inquiète, la grande sœur adolescente fleur bleue qui ne s’entend pas avec sa petite sœur sans gêne et rebelle, le jeune héros de 10 ans appelé à un grand destin (LOL…) – avant de les subvertir dans un second temps pour créer de l’imprévu et du suspens… et surtout parce qu’ils possédaient tous un design qui les rendait assez uniques au sein de leur famille et qui résumait leur caractère en un clin d’œil. Sansa, par exemple, est la seule de sa famille à avoir des cheveux roux éclatants et bien entretenus. Benjen possède des traits anguleux qui en disent long sur la vie rude et froide de la Garde de Nuit. Et le plus identifiable d’entre tous est le blond-châtain de Sean Bean (Ned Stark) qui en plus de n’avoir rien à voir avec le physique décrit dans les livres de Martin, se paye le luxe de nous proposer un copier-coller de son look de Boromir dans le Seigneur des Anneaux (les rides en plus), personnage avec qui il partage d’ailleurs également beaucoup de traits de personnalité. Bref, vous voyez un personnage de Game of Thrones, vous savez directement quelle est sa personnalité et qui il est.

House of the Dragon va devoir répondre aux mêmes défis que son aînée à ce sujet, mais avec des handicaps en plus. Déjà parce que si les Stark étaient 9, les Targaryen seront au moins 15 (sans compter la branche cousine des Velaryon) et tous avec des cheveux blonds argentés. Et c’est sans compter les personnages principaux qui, parce que la série se déroule sur plusieurs décennies, seront joués par plusieurs acteurs différents (ce sera le cas pour la princesse Rhaenyra), ou ceux qui changeront de look durant la saison (comme le prince Daemon selon les différentes bandes-annonces). Un gros travail graphique devra être fait pour que l’on distingue tous ces personnages les uns des autres. Et clairement, à la lumière de certains visuels, on a de quoi s’inquiéter, notamment avec les visuels de Rhaenyra qui ressemblent tout de même beaucoup à la Daenerys de Game of Thrones. Et niveau caractérisation des personnages, là aussi cela risque d’être compliqué à gérer. Là où les membres la famille Stark reprenaient, comme je le disais, les archétypes de la famille nombreuse classique, les membres de la famille Targaryen sont beaucoup plus difficiles à comprendre. D’une part parce qu’elle s’étend sur 5 générations en saison 1 (ouch) avec nombre de branches cousines et d’incestes en folie pour compliquer le tout, d’autre part parce que les archétypes de ces personnages sont, à l’heure actuelle, difficiles à définir précisément dans leur version littéraire.

Car oui, si Game of Thrones était une adaptation du Trône de Fer, un roman qui se met directement dans la peau de ses personnages principaux, House of the Dragon sera une adaptation de la seconde moitié de Feu et Sang, une chronique historique fictive rédigée par un auteur tout aussi fictif qui ne relate les événements qu’il raconte que bien plus tard. Ainsi, les personnages de Feu et Sang nous sont croqués de façon fantasmée et souvent contradictoire. Et adapter ces ébauches de personnage peut se révéler bien plus casse-gueule qu’il n’y paraît. Prenons l’exemple d’un des personnages les plus emblématiques de Feu et Sang : Daemon Targaryen, le Prince Vaurien. Les chroniques le dépeignent comme un ambitieux tout aussi taré et violent que génial et charismatique. Conserver le personnage tel quel dans la série risquerait vite de le rendre creux et unidimensionnel, car encore une fois c’est une version fantasmée de lui-même qui nous est décrite dans les chroniques historiques. Mais à l’inverse, si les scénaristes décident de trop l’humaniser, de trop détailler ses relations avec les autres personnages, de trop expliquer ses actions et comment il vit et ressent les événements, il y a un risque d’aseptiser la figure de légende des livres et de rendre ce personnage plat. Et maintenant, je vous laisse multiplier ce risque pour chacun des personnages de House of the Dragon

Bref, adapter les personnages de Feu et Sang est un travail piégeux et assez casse-gueule. Il n’y a bien sûr rien d’impossible à surmonter pour des bons auteurs et leurs équipes. Comme toujours, la question à se poser est : auront-ils assez de recul sur leur travail et sur les livres de George R.R. Martin pour voir les pièges relevés plus haut, et auront-ils le talent et le savoir-faire pour les surmonter intelligemment afin de nous offrir une grande série ? Il faudra attendre le résultat final pour le savoir !

DroZo

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Compte collectif de La Garde de Nuit.

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