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Recommandations d’octobre : Mois de l’imaginaire

Recommandations d’octobre : Mois de l’imaginaire

C’est devenu une tradition désormais, le mois d’octobre est l’occasion pour les frangines et frangins de la Garde de Nuit de partager avec vous une recommandation en rapport avec le Mois de l’Imaginaire. Évidemment, pour ce faire et puisque le domaine est vaste, nous avons besoin de quelques critères. Aussi nous limiterons-nous aux auteurs francophones, histoire de les mettre en lumière, dans des publications récentes (moins de cinq ans). Si vos Piles à Lire étaient en train de réduire, pas de bol, voici de quoi les remplir pour se glisser doucement vers les mois sombres, une tasse de thé à la main, un plaid sur les genoux et une douce odeur de châtaigne au coin des narines !

Un long voyage, de Claire Duvivier

Couverture d’Un long voyage, de Claire Duvivier, aux éditions Aux Forges de Vulcain.

Est-il besoin de recommander un livre qui vient tout juste d’être auréolé du prix Elbakin.nmet 2020 ? Eh bien quand c’est mérité, il n’y a pas de raison de s’en priver !

Le pitch ? Issu d’une famille de pêcheurs, Liesse doit quitter son village natal à la mort de son père. Fruste mais malin, il parvient à faire son chemin dans le comptoir commercial où il a été placé, au point d’être pris comme secrétaire par Malvine Zélina de Félarasie, ambassadrice impériale dans l’Archipel, aristocrate promise aux plus grandes destinées politiques.
Dans le sillage de la jeune femme, Liesse va s’embarquer pour un grand voyage loin de ses îles et devenir, au fil des ans, le témoin privilégié de la fin d’un Empire.

Comme ça, a priori, pas un roman que l’on classerait dans la même catégorie qu’un Steven Erikson ou un Martin, mais dont l’atmosphère n’est pas moins saisissante. Quelque part entre Rouge Brésil et L’armée des 12 singes, il y a ce texte, anodin s’il en est, dans le paysage de notre fantasy trop souvent clichée. L’éditeur, Aux Forges de Vulcain, signe donc une parution particulière qui vaut le détour par son caractère éminemment contemplatif. Sorte de longue chronique à la première personne du point de vue de Liesse, on y suit le déclin des colonies d’un empire, mais c’est surtout les personnages rencontrés que l’on retiendra, tous attachants en quelques lignes grâce à la plume simple et évocatrice de Claire Duvivier. Si l’on devait lui trouver un défaut, je dirais d’ailleurs que c’est dans la puissance de ce quotidien qu’il réside, rendant le mystère et la conclusion de l’intrigue anecdotique et finalement assez faible en comparaison avec le tableau qui est dressé de l’agonie de cette civilisation.

Bref, si par une soirée à l’atmosphère un brin mélancolique, vous cherchez un court roman  qui change un peu des batailles épiques et des complots politiques, vous avez avec Un long voyage le parfait réceptacle à vos attentes. Et pour les autres, foncez les yeux fermés (mais pas trop, il faut lire quand même !), vous ne regretterez pas d’embarquer avec Liesse et Malvine !

Crys

Je suis fille de rage, de Jean-Laurent Del Socorro

Je suis fille de rage, de Jean-Laurent DEL SOCORRO (ACTUSF)

Dernier né de l’auteur Jean-Laurent Del Socorro, récompensé récemment par un prix Babelio, le livre nous place en pleine guerre de Sécession. Les États-Unis se déchirent, et l’auteur nous place du point de vue de nombreux personnages pour nous faire vivre la guerre, mêlant des personnages historiques (le général Grant, Lincoln, le général Robert Lee…) et des personnages inventés (allant de la simple soldate, de l’esclave affranchie à la contrebandière européenne qui amène les armes des Confédérés… beaucoup de magnifiques portraits de femmes, mais aussi d’hommes du commun). Sont également intercalés au récit des documents historiques (des traductions de lettres et titres de journaux) et des dialogues et récits fantasmés (dont un dialogue de Lincoln avec la Grande Faucheuse, qui vaut au titre sa classification en catégorie « lecture de l’imaginaire », même si l’imaginaire se fait finalement très discret). Nous suivons à la fois des partisans du Sud et du Nord, sans manichéisme, avec beaucoup d’érudition et de nuances.

Il faut le dire : au début, il faut s’accrocher. Beaucoup de personnages, de noms à retenir : qui est qui, à quel camp il appartient, où est-il (on se balade beaucoup sur la ligne de front) ? Si vous voulez un livre qui vous permettra de débrancher vos neurones, passez votre chemin. Mais vous aurez tort ! Ce mélange de précision, avec une documentation historique très fouillée, et de nuances, avec des personnages très justes et touchants, fait du roman une vraie pépite. J’ai personnellement été plus touchée par les personnages du commun (et je pense que c’est le but de l’auteur et l’intérêt de les introduire) mais même les personnages de dirigeants sont également rendus très tangibles et proches du lecteur. Le récit est très dynamique, comme souvent dans les livres de Socorro : des chapitres très courts, qui s’enchaînent et nous déplacent d’un front à l’autre avec fluidité.

Encore plus aujourd’hui, je pense que c’est par ailleurs un livre très utile pour mettre le doigt sur la cicatrice de l’esclavage et la Sécession, qui ont tant marqué les États-Unis qu’on connaît aujourd’hui. L’opposition des États du Sud et Nord, la place des Noirs dans la société américaine… beaucoup de choses se mettent en place en analysant la guerre de Sécession et je pense que pour nous Français, ce genre de bouquins à la fois précis et immersifs est une très bonne porte d’entrée pour comprendre davantage et vouloir ensuite aller plus loin.

Vraiment une bonne lecture donc ! Et je voudrais en plus saluer le travail d’édition, parce que le livre est paru dans la très jolie collection ActuSF avec des couvertures carton super classes, et surtout, a été pensé hyper intelligemment dans la pagination pour le lecteur : on a tout un tas de guides pour se retrouver sur qui est qui, où est quel front, qui est dans quel camp… Franchement, l’éditeur a fait un chouette boulot je trouve !

Nymphadora

Les machines fantômes, d’Olivier Paquet

Les machines fantômes, d'Olivier Paquet, aux éditions l'Atalante

Les machines fantômes, d’Olivier Paquet, aux éditions l’Atalante

Dans un futur proche, divers personnages voient leur existence bouleversée par les Intelligences Artificielles (IA). Adrien, le trader qui contourne les lois. Aurore, la chanteuse sulfureuse qui mène une double vie. Kader, ex-soldat d’élite traumatisé. Lou, joueuse en ligne douée et un peu tricheuse. Ils seront confrontés à Joachim, jeune homme asocial, talentueux et maître de la manipulation.

Ce roman d’anticipation explorant le thème des IA bascule dans un thriller dont l’évolution est surprenante. Le traitement des IA est à la fois subtil et onirique, l’auteur utilisant des métaphores pour leur donner vie. C’est très plaisant à lire ! De façon générale, la plume est plus littéraire que bien des romans d’anticipation, le texte est riche et agréable.

Le récit sait rendre réalistes des scènes du quotidien qui alternent avec des moments d’action. L’auteur attendant désespérément des visiteurs lors d’un salon du livre d’une bourgade de province m’a beaucoup fait sourire, on dirait du vécu ! Je n’oublie pas non plus la peinture des lieux qui est très réussie, notamment la vision glaciale de La Défense, quartier d’affaires que j’évite quand je le peux. Dans la même veine, j’ai apprécié les personnages qui sont approfondis et recèlent des surprises. En filigrane émerge le thème des apparences et du contrôle de son destin.

Les principaux acteurs sont évoqués sans jamais être décrits frontalement : les IA. Peu à peu, le lecteur apprend à les connaître et devine un monde étrange qui se cache et qui est partout, autour de nous. Sans jamais tomber dans la hard SF, ils prennent vie et montrent une complexité inattendue.

Si vous avez envie d’un roman sur les IA bien écrit et rythmé, n’hésitez pas à découvrir celui-ci.

FeyGirl

Moitiés d’âme (Chroniques des Cinq Trônes, tome 1), d’Anthelme Hauchecorne

Couverture de Moitiés d’âme, d’Anthelme Hauchecorne chez Gulf Stream.

Il faut bien avouer que la première chose qui m’a attirée dans ce roman, c’est le livre en lui-même. On dit bien de ne pas juger un livre par sa couverture mais je dois reconnaître que ce roman de chez Gulf Stream (éditeur nantais) est particulièrement beau. C’est assez rare en France d’avoir des hardcovers dans ce genre, donc moi et ma collectionnite aiguë avons tout de suite été attirées. Dorure, marque-page, illustrations intérieures, illustration sur la tranche, couverture rigide. C’est déjà un très beau livre, pensé comme un bel objet.

Mais bien sûr, un livre non lu perd beaucoup de son intérêt, donc parlons de l’intérieur maintenant. On y parle de mägerie, de mäges, de mariage forcé, de cinq trônes et d’hiver… Oui moi aussi tout de suite j’ai bien pensé à qui vous savez… De plus on commence par une jolie carte, avec les différents royaumes (été/hiver…) bref, au début, je ne vais pas mentir, je me suis dit : « Holà ! Un nouveau Trône de fer, non c’est bon j’attends déjà l’autre depuis assez longtemps. » Et puis, même si on se doute bien qu’il y aura d’autres tomes et que l’on part pour une longue aventure, on se laisse emporter. On y découvre un couple, pas très bien assorti il faut bien l’avouer, des liens étranges entre mägerie et faëes, des pouvoirs étonnant, une communauté très rôliste. Et des secrets, pleins de secrets… Je n’ai pas envie de trop vous spoiler, car si j’ai eu peur de lire quelque chose que j’avais déjà lu, ça n’a pas été le cas, on est bien introduit dans ce nouveau monde fantasy, sans non plus crouler sous les détails (roman d’introduction oblige).

Au début, il y avait les Faëes divisées en 4 royaumes et pour chaque royaume un style de mägerie, et vinrent les humains… le cinquième royaume. Les faëes acceptèrent de leur apprendre la mägerie, mais ils n’étaient pas très doués… et pire ils devront être un couple pour la pratiquer… Les humains toujours aussi adorables finirent en guerre contre les Fäees et par réguler la pratique de la mägerie. Voilà, je n’en dirais pas plus, il y a des centaines de résumés bien mieux écrit que le mien sur internet, mais je pense que le mieux, c’est de découvrir la suite par vous-même !

Pour qui (on le trouve au rayon lecture adolescente…) ? Pour tout le monde en vérité. Les plus jeunes seront emportés dans ce monde magique (les plus vieux aussi, je vous rassure), mais les adultes s’intéresseront de plus près aux relations compliquées que peuvent créer ces pouvoirs…

Ce n’est peut-être pas le roman du siècle, mais il fait son office et sans surprise. Je m’attaquerai au tome deux dès que celui-ci sera disponible !

Malicia

Conclusion

Voilà donc un joli palmarès pour ce Mois de l’imaginaire. Et comme c’est déjà la troisième fois que nous nous attelons à mettre en lumière les auteurs francophones des littératures de l’imaginaire, si vous n’apercevez pas certains noms, n’hésitez pas à consulter l’annuaire de toutes les recommandations publiées sur le blog de la Garde de Nuit.

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Compte collectif de La Garde de Nuit.

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