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J’aborde à présent la structure du récit et les personnages, donc le risque de divulgâchage est plus élevé, même si je ne vais pas dévoiler d’éléments importants de l’intrigue.
Je précise d’abord qu’il est possible de lire la trilogie sans avoir rien lu précédemment de l’auteur. Bien sûr, on perd en connaissance préalable de l’univers, de certains des personnages, notamment les deux principaux, Ædan de Vaumacel (le Chevalier aux épines) et Benvenuto Gesufal (l’Assassin). Mais la trilogie se suffit à elle-même. En revanche, l’idéal est d’avoir bien en tête l’intégralité des romans et nouvelles ayant pour cadre le Vieux Royaume pour goûter pleinement les allusions du « Chevalier aux épines ». A minima, la (re)lecture de deux nouvelles de « Janua Vera », « Mauvaise donne » et « Le service des dames », permet de faire connaissance avec les deux principaux protagonistes.
L’organisation de la trilogie est complexe. Elle s’organise en chapitres narrés depuis plusieurs points de vue (PdV). Le volet central (« Le Conte de l’assassin ») est principalement narré (comme son titre le laisse présager) par Don Benvenuto Gesufal, bien connu des lecteurs de « Janua Vera » et de « Gagner la guerre ». Le premier et le troisième tomes sont principalement racontés du point de vue d’Ædan de Vaumacel (le Chevalier aux épines), mais d’autres PdV interviennent : le paysan Winnoc, le jeune chevalier Yvorin de Quéant, le seigneur Rainfroi du Treff, la mystagogue Prudence, le chat Mirabilis, le page Cœl, … On trouve aussi des extraits d’un roman courtois, « Le Bel Eglantier ». Et le tout (les trois tomes) est enchâssé dans le propos d’une personne mystérieuse, écrivant depuis un lieu tout aussi mystérieux, et qui ne prétend pas à l’omniscience. Sans parler de quelques récits dans le récit, comme celui d’un ex-prisonnier des Ouromands. Cette structure complexe amène à des croisements de regards et des superpositions de discours intéressants.
Quant à la trame temporelle, le deuxième tome, celui de Benvenuto, se passe à Ciudalia et ne prend pas immédiatement la suite du premier, puisqu’il va reprendre les évènements déjà abordés dans ce tome, mais du point de vue ciudalien. Il rattrape la fin du premier tome à peu près aux deux-tiers de sa durée, puis poursuit jusqu’à son terme (une structure entrelacée qui rappelle celle des tomes 4 et 5 du TdF). Le troisième tome reprend le fil peu après la fin du deuxième.
Les personnages principaux sont d’abord ceux qui ont donné leur nom aux deux premiers tomes, Ædan de Vaumacel et Benvenuto Gesufal. On peut également citer le jeune chevalier Yvorin de Quéant, le page Cœl et l’énigmatique narrateur. Les autres personnages sont secondaires, certains n’apparaissant que le temps de jouer un rôle précis, d’autres restant plus constants, mais sans jamais voler la vedette aux principaux.
Ædan de Vaumacel, quoique très présent dans les tomes 1 et 3, reste une énigme pour le lecteur, car la narration reste cantonnée au comportement du Chevalier aux épines, à ses réactions et à ses propos, sans presque jamais avoir accès à son for intérieur, ou sinon de manière superficielle. Le roman ne mentionne pas ce que pense ou ressent Ædan, mais uniquement les manifestations extérieures de ses pensées. Cela change à la fin du troisième tome, mais je n’en dirai pas plus.
Benvenuto, au contraire, narre ses aventures à la première personne. C’est d’ailleurs ce qui le rend plus humain que les autres, car, bien que ce soit une canaille de la pire espèce, on est dans ses pensées, on comprend ses motivations, on partage ses craintes et ses espérances, et on compatit à ses malheurs. C’est un sale type, mais sa gouaille, son aplomb et sa capacité de survie attirent malgré tout la sympathie… sauf quand vraiment ses actes dépassent les bornes.
Pour ce qui est de l’intrigue, son nœud est énoncé au chapitre IV du premier tome : le duc Ganelon de Bromael a répudié son épouse Audéarde pour l’adultère qu’elle aurait commis avec Ædan de Vaumacel. Ce dernier ne s’étant pas présenté au procès, le champion du duc a vaincu celui de son épouse, qui a donc été jugée coupable et recluse dans un monastère. Le duc a ensuite épousé Clarissima, la fille du richissime podestat de Ciudalia, Leonide Ducatore. Mais les fils d’Audéarde veulent restaurer l’honneur de leur mère et défient leur père, avec l’appui de son puissant vassal, le comte Angusel de Kimmarc : ce dernier organise un grand tournoi, dont l’enjeu sera une tour portant les couleurs d’Audéarde.
Les préparatifs du tournoi et son déroulement occupent une bonne moitié de la trilogie, et l’autre moitié est consacrée à ses conséquences. Mais beaucoup d’autres intrigues secondaires se mêlent à celle-ci : la quête d’Ædan qui recherche des ravisseurs de jeunes paysans, les amours d’Yvorin, la menace des féroces clans ouromands, les projets des prêtres du culte du Desséché, le destin de Cœl, … mais impossible d’en dire plus !