La version française

Forums Le Trône de Fer – la saga littéraire Hors-livres La version française

  • Ce sujet contient 169 réponses, 56 participants et a été mis à jour pour la dernière fois par Tybalt Ouestrelin, le il y a 10 mois et 2 semaines.
20 sujets de 151 à 170 (sur un total de 170)
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    Messages
  • #174905
    Nymphadora
    • Vervoyant
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    à quel animal pense-t-il quand il écrit moose ou elk ?

    Pour le coup, y a pas trop de mystère là-dessus : il pense au moose américain et à l’elk américain. George a vécu à Boston, dés que tu prends ta voiture et sors de la ville, tu as des panneaux « attention aux moose » (et encore, j’ose même pas imaginer ce que c’était quand il était plus jeune, à l’époque il y avait une population d’animaux encore plus dense), et tu les distingues très bien des panneaux « elk crossing » … Si tu as vécu dans ce genre de région, tu connais la différence entre les deux… Rajoute à ça que tu as des équipes de sport qui ont des logos moose (genre les moose de Manitoba), des mascottes moose, des peluches… les américains savent ce qu’est un moose et que c’est différent d’un elk.

    ~~ Always ~~

    #174914
    Obsidienne
    • Pisteur de Géants
    • Posts : 1044

    …Petite incursion hors d’AGOT : dans ASOS et ADWD, la monture de Mains-froides en VO est un great elk, traduit par orignac géant. Je trouve cette confusion regrettable, ne serait-ce que parce qu’elle peut induire chez le lecteur francophone l’idée d’un lien entre les Corbois et Mains-froides, lien inexistant en VO. Je propose donc de s’en tenir à une équivalence simple : moose = orignac ; elk = élan.

    Du coup, la monture de Mains-froides évoquerait plutôt la maison Baratheon … et un lien potentiel avec l’andouiller ayant tué la louve, mère des louveteaux des enfants Starks …

    • Cette réponse a été modifiée le il y a 1 année et 8 mois par Obsidienne.

    "Vé ! " (Frédéric Mistral, 1830-1914)
    " Ouinshinshoin, ouinshinshishoin " ( Donald Duck, 1934)

    #174916
    Eridan
    • Vervoyant
    • Posts : 6024

    à quel animal pense-t-il quand il écrit moose ou elk ?

    J’ai déjà sa réponse : « I think of moose or elk. »

    Du coup, la monture de Mains-froides évoquerait plutôt la maison Baratheon …

    Les Baratheon, c’est un « stag » , un cerf.

    "Si l'enfer est éternel, le paradis est un leurre !"

    #174919
    Obsidienne
    • Pisteur de Géants
    • Posts : 1044

    à quel animal pense-t-il quand il écrit moose ou elk ?

    J’ai déjà sa réponse : « I think of moose or elk. »

    Du coup, la monture de Mains-froides évoquerait plutôt la maison Baratheon …

    Les Baratheon, c’est un « stag » , un cerf.

    Noté !

    "Vé ! " (Frédéric Mistral, 1830-1914)
    " Ouinshinshoin, ouinshinshishoin " ( Donald Duck, 1934)

    #174945
    Lapin rouge
    • Fléau des Autres
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    Par curiosité, je suis allé voir comment Patrick Marcel traitait le problème moose/elk dans ADWD.

    Pour moose, trois occurrences :

    Banners flew above its walls: a moose, a battle-axe, three pine trees, longaxes crossed beneath a crown, a horse’s head with fiery eyes.

    Des bannières flottaient au-dessus des remparts : un élan, une hache de guerre, trois pins, des grands haches croisées sous une couronne, une tête de cheval aux yeux ardents.

    (Jon IV)

    …the Umber giant and the stony hand of Flint, the Hornwood moose.

    …le géant des Omble et la main de pierre des Flint, l’orignac des Corbois.

    (Schlingue III)

    …the moose of Hornwood and the merman of Manderly.

    …l’orignac de Corbois et le triton de Manderly.

    Pour elk, trop d’occurrences pour les citer toutes (20), mais la traduction est tantôt élan, tantôt orignac (notamment chaque fois qu’il s’agit de la monture de Mains-froides).

    Donc P. Marcel n’a, pas plus que J. Sola, une traduction fixe. C’est dommage.

    Du coup, j’ai recherché l’usage des deux mots dans la VO. Il en ressort que moose est toujours utilisé pour décrire les armes Corbois, et jamais pour désigner un animal, à une exception (ASOS, chap 42, Jon V) :

    Jon had to bite his tongue. He didn’t want to know about Del’s girl or Bodger’s mother, the place by the sea that Henk the Helm came from, how Grigg yearned to visit the green men on the Isle of Faces, or the time a moose had chased Toefinger up a tree.

    Au contraire, elk désigne toujours un animal.

    They can keep their heaven. When I die, I’d sooner go to Middle Earth.
    #177001
    Valten
    • Éplucheur de Patates
    • Posts : 9

    Ça fait longtemps que ce topic me titille, alors je me lance ! (pavé en approche)

     

    Pour ma part, j’aime la traduction de Jean Sola. J’ai bien conscience qu’elle est très imparfaite et qu’elle s’éloigne de la version originelle de G.R.R.Martin. J’ai l’impression qu’une traduction littérale me serait insupportable. C’est l’expérience que j’ai faite en lisant le blog repéré par babar des bois : je suis d’accord avec ce que dit l’autrice, mais quand elle propose des traductions alternatives, je n’accroche pas du tout. En fait, je pense qu’une traduction de l’américain adaptée pour le marché français s’écarte pas mal d’une traduction littérale. J’ai plusieurs raisons (c’est un avis éminemment subjectif) :

    • Les médiévalismes : Martin écrit dans un langage moderne, Sola nous fait découvrir de nouveaux mots, ou plutôt de très vieux. Pour moi, ces mots anciens font partie de l’ambiance médiévalisante : j’ai du mal à y entrer dans l’univers si les personnages parlent trop d’une manière que j’associe au XXe siècle. Je pense que nous n’avons pas le même rapport à l’histoire, en particulier au Moyen Âge, que la culture américaine. Comme on en a des traces tout autour de nous, il est bien plus proche et plus connu, on a besoin de plus pour « y croire ». En France, comment on fait entrer un public dans un cadre médiéval ? on commence par « Oyez, oyez, damoiselles et damoiseaux » ! De plus, ces mots anciens sont souvent des mots techniques, qui appartienne à un domaine particulier qui n’est aujourd’hui plus très connu (exemple : l’escrime et les armes blanches). Ce point précis résonne avec le suivant :
    • Les répétitions. La langue anglaise est, me semble-t-il, beaucoup plus tolérante aux répétitions que le français. On ne s’en rend pas compte en lisant le texte original parce que l’anglais n’est pas notre langue maternelle et que c’est plus facile et agréable pour nous d’avoir le même mots plusieurs fois de suite que des mots plus rares, mais Martin a, me semble-t-il, un style très répétitif. Je ne sais plus quelle scène m’en a fait prendre conscience, mais il y avait des sword et autres longsword à toutes les lignes. Alors oui, « estramaçon » n’est pas la traduction la plus évidente de sword (c’est un de ces mots techniques dont je parlais), mais en français ça nous rend la lecture plus agréable.
    • De même pour la complexité des phrases. Un style agréable, lisible, en français n’est pas identique à un style agréable en anglais. Ce qui me marque avec les traductions les plus « libres » de Sola, c’est qu’il essaie à travers ça de rendre l’esprit, le ton des pensés de ses personnages, avec les contraintes décrites dans les points précédents. Et je trouve qu’il y parvient plutôt bien. Évidement, cette question d’esprit du passage réside beaucoup dans l’interprétation qu’on en fait, et certaines interprétations de Sola se révèlent fausses. Les citations des passages concernant l’état d’esprit de Ned par rapport à Jon me semblent faire partie de cette limite, mais c’est parce que, ayant lu la suite et plein de théories sur internet, on pense que le texte français ne rend pas bien les sentiments de Ned vis-à-vis de Jon. C’est aussi une interprétation (attention, ne pas comprendre négativement cette notion d’interprétation : c’est une étape nécessaire de la lecture d’un texte).

    En gros, en français on est habitué depuis l’école à valoriser un style plus développé qu’en anglais, et que celui de Martin en particulier ; et on a un rapport à l’époque médiévale différent des américains.

     

    J’aimerais aussi attirer votre attention sur cette question : qu’est-ce qu’une bonne traduction ? Et je vous propose un exemple : la Bible. Des traductions de la Bible en français, il en sort très régulièrement, peut-être tous les 3 ans. Il y a des traductions proposées par des chercheurs, qui sont aussi littérales que possible, pour être aussi prêt de ce que voulait dire l’auteur. De ce type-là, il en existe 2 principales. Et devinez quoi : il y a des passages où elles divergent complètement. Parfois, elles sont incompréhensibles parce que l’hébreu est une langue d’images, très peu conceptuelle, et que le sens des images s’est perdu.

    Et puis il y a des traductions qui ont d’autres objectifs. Il y a la traduction pour les offices et la messe : celle-là doit être facile à comprendre dans une lecture à voix haute. Par exemple, Messie en hébreux ou Christ en grec signifient « Oint » en français (comme dans « j’aime être enduit d’huile »). Sauf que « L’Oint de Dieu », ça sonne comme « Loin de Dieu », qui est à l’oreille plus intuitif et un contresens. Du coup cette traduction va préférer « Messie ». C’est un exemple tout bête, mais cette nécessité orale fait que la traduction est différente.

    Autre exemple de traduction : la traduction en français moderne. On va essayer de simplifier les mots trop loin de nous, qui n’évoquent rien ou demandent un dictionnaire. Du coup « sacrifice et holocauste » devient un truc comme « sacrifice et sacrifice par le feu ». Ce n’est pas idéal, mais un livre qui demande un dictionnaire à côté est-il vraiment lisible ?

     

    Bref, il me semble qu’il faut juger une traduction par rapport à ses objectifs (j’ai vraiment écrit un si long détour pour ne dire que ça?!) Pour la traduction française de A Song of Ice and Fire, ce n’est pas d’être aussi fidèle que possible pour que les compilateurs de l’encyclopédie et les théoriciens puissent travailler directement sur le français (comme pour la Bible, il faut travailler dans la langue originelle pour ça). La version française a un impératif de rentabilité économique, et pour ça il lui faut être agréable à lire pour le lecteur francophone typique de fantasy.

    Je ne sais pas très bien ce que recoupe cette catégorie de population pour les éditeurs de Pygmalion, mais dans ma tête elle est française (par rapport à toutes les régions du monde où on parle français) et de milieu plutôt éduqué, du genre à apprécier un style plus développé que celui de Martin. J’imagine que quand Pygmalion choisi un Jean Sola pour traduire Martin, ils sont conscients de leurs styles respectifs.

    • Cette réponse a été modifiée le il y a 1 année et 8 mois par Valten.
    • Cette réponse a été modifiée le il y a 1 année et 8 mois par Valten.
    #177149
    Obsidienne
    • Pisteur de Géants
    • Posts : 1044

    Merci, merci, Frère Valten, pour ce bel exposé sur « De la traduction » !

    On sent chez toi le linguiste ; je ne le suis pas (formation scientifique) mais j’aime les mots et les phrases ciselées !

    Ça fait longtemps que ce topic me titille, alors je me lance ! (pavé en approche) Pour ma part, j’aime la traduction de Jean Sola.

    Comme toi, j’ai retrouvé avec plaisir dans la traduction de Sola des mots, vieux amis depuis longtemps perdus de vue !

    J’ai bien conscience qu’elle est très imparfaite et qu’elle s’éloigne de la version originelle de G.R.R.Martin. J’ai l’impression qu’une traduction littérale me serait insupportable… Martin écrit dans un langage moderne…

    Préambule : si j’aime manier le français, y compris en utilisant des mots inusités, voire en réhabilitant l’imparfait du subjonctif, je suis une brèle en anglais … Je le lis, lentement  (et ne le comprends guère à l’oral) .

    Les passages en V.O. que j’ai pu lire grâce aux citations de nos frères et sœurs m’ont surprise et déçue : j’ai trouvé le style  plat, très, très loin, justement de l’ambiance créée par Jean Sola …
    Comme tu le soulignes par la suite, nous n’avons ni pas même culture que les américains et la structure de nos langues est différente.

    Alors … « Traduction, trahison » ?

    Je dirais pis-aller mais mal nécessaire  pour ceux qui, comme moi, n’auraient jamais eu accès à l’œuvre !
    Cependant, je vais répéter ce que j’ai déjà dit : on ne devrait jamais traduire les noms propres mais en expliquer la signification. Exemple (pour les « encore plus brèle que moi en anglais » ^^ ! ) : dire que Riverrun est formé sur river=rivière et run=courir ).
    Merci encore pour ton pavé !

    • Cette réponse a été modifiée le il y a 1 année et 8 mois par R.Graymarch.

    "Vé ! " (Frédéric Mistral, 1830-1914)
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    #177226
    Lapin rouge
    • Fléau des Autres
    • Posts : 4069

    Merci Valten pour ce développement argumenté, qui m’a inspiré quelques réflexions.

    J’ai l’impression qu’une traduction littérale me serait insupportable. C’est l’expérience que j’ai faite en lisant le blog repéré par babar des bois : je suis d’accord avec ce que dit l’autrice, mais quand elle propose des traductions alternatives, je n’accroche pas du tout. En fait, je pense qu’une traduction de l’américain adaptée pour le marché français s’écarte pas mal d’une traduction littérale.

    Bien sûr, une traduction littérale n’est pas souhaitable. Le travail du traducteur, et la difficulté de sa tâche, c’est de traduire le plus fidèlement possible l’original, en sachant qu’il lui faut sans cesse faire des compromis entre rendre le sens le plus rigoureusement possible, rester fidèle au style original, tout en veillant à l’expérience de lecture pour le destinataire. C’est impossible, donc une traduction est toujours critiquable. Oui, une bonne traduction ne sera jamais littérale (sinon les traducteurs auraient depuis longtemps étés remplacés par les outils de traduction automatique.

    Les médiévalismes : Martin écrit dans un langage moderne, Sola nous fait découvrir de nouveaux mots, ou plutôt de très vieux. Pour moi, ces mots anciens font partie de l’ambiance médiévalisante : j’ai du mal à y entrer dans l’univers si les personnages parlent trop d’une manière que j’associe au XXe siècle. Je pense que nous n’avons pas le même rapport à l’histoire, en particulier au Moyen Âge, que la culture américaine. Comme on en a des traces tout autour de nous, il est bien plus proche et plus connu, on a besoin de plus pour « y croire ». En France, comment on fait entrer un public dans un cadre médiéval ? on commence par « Oyez, oyez, damoiselles et damoiseaux » ! De plus, ces mots anciens sont souvent des mots techniques, qui appartienne à un domaine particulier qui n’est aujourd’hui plus très connu (exemple : l’escrime et les armes blanches).

    Je ne suis pas sûr que le Moyen-Âge nous soit considérablement plus proche qu’au lectorat américain. A moins de vivre dans une ville comme Provins ou Carcassonne, il n’est pas nécessairement très présent dans notre vie quotidienne. Quant à avoir besoin de « médiévalismes » pour y croire, je suis également sceptique. Pour ma part, l’emploi de médiévalismes vrais ou supposés, du genre « Oncques ne vit plus charmante damoiselle », ça a plutôt tendance à me faire sourire, et donc à me sortir de l’ambiance. Et je ne suis pas sûr que la traduction de Sola soit si utilisatrice de médiévalismes. Elle a recours à beaucoup d’archaïsmes, mais combien sont réellement du Moyen-Âge ?

    Pour ce qui est des répétitions et de la complexité des phrases, oui, je suis d’accord avec toi pour dire que l’anglais-américain et le français ne sont pas construits de la même manière, et que le traducteur doit en tenir compte. Je suis également d’accord pour estimer que le traducteur doit tenir également compte de l’agrément de lecture du lectorat de destination. Mais je nuancerai ce dernier point : certes, le texte traduit doit être lisible en français, mais il doit également être fidèle à l’original : si ce dernier est (volontairement ou non) obscur, embrouillé, confus, la traduction doit-elle chercher à l’« améliorer » ?

    Mais ce n’est pas la question concernant Martin : tous ses lecteurs s’accordent à dire que son style est compréhensible, efficace, percutant. Et beaucoup (pas toi) trouvent la traduction française lourde et obscure. Est-ce un c hoix de rentabilité économique ? J’en doute.

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    #182905
    R.Graymarch
    • Vervoyant
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    Lu sur un forum, dans une (ancienne ?) version italienne, la direwolf (meta lupo… ou peut-être lupa au féminin) qui donne naissance aux direwolves des Stark a été tuée par une corne de licorne « car ça fait davantage fantasy ».

    Le nombre de théories qu’on aurait pu faire en incriminant les Brax !!!

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    DOH. #TeamLoyalistsForeverUntilNow. L’élu des 7, le Conseiller-Pyat Pree qui ne le Fut Jamais

    #182916
    Babar des Bois
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    Lu sur un forum, dans une (ancienne ?) version italienne, la direwolf (meta lupo… ou peut-être lupa au féminin) qui donne naissance aux direwolves des Stark a été tuée par une corne de licorne « car ça fait davantage fantasy ».

    Ouaip, même George il est choqué : https://www.lagardedenuit.com/george-rr-martin-londres-retour-patrouille/#la-rencontre-de-la-garde-de-nuit-avec-martin

    #hihihi
    Co-autrice : "Les Mystères du Trône de Fer II - La clarté de l'histoire, la brume des légendes" (inspirations historiques de George R.R. Martin)
    Première Prêtresse de Saint Maekar le Grand (© Chat Noir)

    #182920
    R.Graymarch
    • Vervoyant
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    Ah oui merci j’avais oublié. Quitte à « améliorer » la version en italien, le traducteur aurait pu ne mettre que deux direwolves nouveaux nés en hommage aux fils de la louve quand même

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    #183005
    Lapin rouge
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    Lu sur un forum, dans une (ancienne ?) version italienne, la direwolf (meta lupo… ou peut-être lupa au féminin) qui donne naissance aux direwolves des Stark a été tuée par une corne de licorne « car ça fait davantage fantasy ».

    Il se trouve que je suis en Italie, je suis donc allé vérifier dans une librairie, et je peux annoncer que cette déplorable traduction a été corrigée. Le texte fait à présent bien état d’un andouiller (frammento di palco di cervo).

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    #192114
    Lapin rouge
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    Copié depuis le topic consacré à la relecture du chap. 20 d’AFFC, Le Noyé :

    Il y a un candidat qui m’a bien fait rire, c’est Erik Forgefer et sa façon bien à lui de s’exprimer :

    Si mahous, ça veut dire balèze, alors y a pas d’quinqu’un p’us balèze qu’mézigue.

    Je riais en l’imaginant s’exprimer ainsi devant la foule (en VO, son parler est-il aussi fleuri ?).

    Je riais en l’imaginant s’exprimer ainsi devant la foule (en VO, son parler est-il aussi fleuri ?).

    non, la fleur vient de Sola

    “I can’t count how many hands I’ve smashed to pulp with that hammer,” Erik said, “but might be some thief could tell you. I can’t say how many heads I’ve crushed against my anvil neither, but there’s some widows could. I could tell you all the deeds I’ve done in battle, but I’m eight-and-eighty and won’t live long enough to finish. If old is wise, no one is wiser than me. If big is strong, no one’s stronger. You want a king with heirs? I’ve more’n I can count. King Erik, aye, I like the sound o’ that. Come, say it with me. ERIK! ERIK ANVIL-BREAKER! ERIK KING!

    Les choix de traduction sont toujours discutables … Celui-ci l’est tout particulièrement. A tel point qu’il avait été relevé par Frédéric Landragin, dans son article « DO YOU SPEAK DOTHRAKI ? », Les mots du Trône de Fer (Le Trône de Fer et les sciences, Belin). Ca m’avait agréablement surpris de trouver l’analyse d’un passage aussi « spécifique » dans un article général (dont je vous recommande la lecture).

    « La tirade d’Erik Forgefer, prétendant de quatre-vingt-huit ans, verse clairement dans la caricature […]
    Plus la peine de compter les apostrophes, les mots familiers et argotiques, les mauvaises utilisations de la négation : cette fois, le registre de langue ressemble au parler de voyous parisiens des années 1910. Non seulement c’est caricatural, mais cela a des conséquences qui dépassent largement l’intention du texte original.
    Premièrement, c’est terriblement daté : plus personne ne parle ainsi de nos jours, et des mots comme « mézigue » ancrent les paroles d’Erik dans un contexte qui n’a rien à voir avec celui du Trône de fer. Une telle traduction ajoute au texte des références françaises très précises. Or le travail du traducteur consiste justement – ce qui n’est pas forcément facile – à ne pas introduire de telles références, inévitablement en conflit avec celles du monde fictif.
    Deuxièmement, il s’agit de clichés. On peut en utiliser de manière parcimonieuse, mais tout excès finit par les rendre manifestes. Dans le cas présent, le lecteur se lasse assez vite de ces mécanismes et en vient à prendre le personnage qui parle pour un abruti. Même le vieil Erik Forgefer ne mérite pas un tel qualificatif. La preuve : il a construit son argumentation, reprenant un à un les traits qui font un roi et se les attribuant.
    Troisièmement, on arrive ici dans de l’oral transcrit, phonème après phonème. Le procédé peut sembler adéquat pour des dialogues – oraux, donc – mais convient mal à la lecture. Quand on lit un roman, on le fait silencieusement et on imagine la situation d’interaction, avec ses hésitations, bafouillements et intonations qui n’ont pas besoin d’être appuyés. Les dialogues sont faits pour être lus, pas pour être prononcés. Utiliser de l’oral transcrit ne va pas dans ce sens : c’est fait au contraire pour rendre compte de la prononciation, et donc pour être prononcé plutôt que lu. »

    Je me demande dans quelle mesure ce choix de traduction, et la difficulté de lecture qui en découle, n’ont pas altéré mon appréciation sur les Fer-nés pendant longtemps.

    • Cette réponse a été modifiée le il y a 10 mois et 2 semaines par Lapin rouge.
    • Cette réponse a été modifiée le il y a 10 mois et 2 semaines par Lapin rouge.
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    #192129
    FeyGirl
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    Troisièmement, on arrive ici dans de l’oral transcrit, phonème après phonème. Le procédé peut sembler adéquat pour des dialogues – oraux, donc – mais convient mal à la lecture. Quand on lit un roman, on le fait silencieusement et on imagine la situation d’interaction, avec ses hésitations, bafouillements et intonations qui n’ont pas besoin d’être appuyés. Les dialogues sont faits pour être lus, pas pour être prononcés. Utiliser de l’oral transcrit ne va pas dans ce sens : c’est fait au contraire pour rendre compte de la prononciation, et donc pour être prononcé plutôt que lu.

    C’est HS, mais je trouve cette remarque très intéressante pour les écrivains amateurs de l’écritoire, dont je fais partie.

    #192132
    Tizun Thane
    • Pisteur de Géants
    • Posts : 1285

    C’est HS, mais je trouve cette remarque très intéressante pour les écrivains amateurs de l’écritoire, dont je fais partie.

    La particularité des dialogues dans un roman, c’est qu’ils doivent être faux mais sonner vrai.

    Si on prend le temps d’observer de vrais dialogues dans la vraie vie, par exemple en les enregistrant, on se rendra compte que les phrases sont grammaticalement confuses, interrompues, inachévées, coupées par l’interlocuteur.

    Dans un roman, le dialogue doit être clair et véhiculer quelque chose, pas être du bruit pour remplir le vide (comme 90% des vrais dialogues ).

    Par exemple, dire oralement « Nan, mais …. Bah, je sais pas moi, faudrait voir ….euhhh… avec mon …. mon N+1. Oui, voilà quoi. » Il y a un peu de confusion, mais le message est passé.

    Dans un roman, reprendre ce dialogue tel quel fait passer celui qui le dit pour le dernier des idiots.

    #192136
    R.Graymarch
    • Vervoyant
    • Posts : 9925

    On le voit aussi quand on transcrit des interviews (et des fois on s’arrache les cheveux pour savoir comment tourner ça).

    Mais Sola n’avait pas ce souci à la base vu que 1/c’était sous forme écrite et 2/le texte VO n’était pas vraiment sous forme orale.

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    #192137
    Eridan
    • Vervoyant
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    Pour continuer la digression, je pense qu’on peut se permettre néanmoins quelques « oralités » dans le dialogue … mais il faut que ce soit peu fréquent, que ça n’empêche pas de comprendre le sens de ce qui est dit et que ce soit porteur d’un sens intrinsèque intéressant pour le développement du personnage. Je pense ici par exemple au discours du comte Hasimir Fenring de Dune, ponctué de longues hésitations, et qui sont immédiatement expliquées dans le texte :

    « Hummmmm, fit le Comte en posant les yeux sur Feyd-Rautha. C’est… Mmmm… ce jeune homme-là… Mmm… Ma chère ? (Il regarda le Baron.) Mon cher Baron, vous disiez que vous aviez parlé de nous à ce jeune homme ? Que lui avez-vous donc dit ? »
    « J’ai fait part à mon neveu de la grande estime en laquelle vous tenait l’Empereur, Comte Fenring », dit le Baron. Et il pensa : Repère-le bien, Feyd ! C’est un tueur avec des façons de lapin… L’espèce la plus dangereuse.

    Dune – tome 1.

    Par la suite, on a tout un développement sur le fait que le comte est difficilement « saisissable » , ce qui va très bien avec son discours, légèrement agressif, mais en même temps dans la retenue et ponctué par ces longues hésitations … Le style est d’autant plus supportable que Fenring est un personnage secondaire, qui s’exprime finalement assez peu !

    La trad du TdF a l’écueil inverse : de nombreux personnages qui s’expriment parfois beaucoup se retrouvent à avoir un langage difficile à suivre, avec généralement pour seul dénominateur commun, pour seule explication leurs origines sociales modestes. Bon, Martin avait quand même amorcé certaines choses (le « m’ssire » au lieu du « messire » par exemple), mais pour certains personnages (comme Erik ou Yoren), on tombe dans l’excès et l’inintelligibilité.

    "Si l'enfer est éternel, le paradis est un leurre !"

    #192139
    cryoflammer7
    • Éplucheur de Patates
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    Bonsoir,

    Je vous rejoins sur certains points. Il y a des VF qui sont mauvaises mais l’on ne peut pas tout mettre dans le même panier.

    Regardez le film Mario sorti cette année, il est d’une grande qualité et la VF apporte une grande résonnance au film. De nombreux pays sont en admiration devant cette adaptation française.

    D’autres films ont aussi une grande expérience en VF. Malgré tout, cela reste subjectif comme la critique de cinéma :).

    #192144
    Obsidienne
    • Pisteur de Géants
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    Bonsoir, Je vous rejoins sur certains points. Il y a des VF qui sont mauvaises mais l’on ne peut pas tout mettre dans le même panier. Regardez le film Mario sorti cette année, il est d’une grande qualité et la VF apporte une grande résonnance au film. De nombreux pays sont en admiration devant cette adaptation française. D’autres films ont aussi une grande expérience en VF. Malgré tout, cela reste subjectif comme la critique de cinéma :).

    La présente discussion porte sur la traduction de A Song of Ice and Fire.
    A l’évidence, il y a du pire et du meilleur dans les traductions dans leur ensemble !
    Toutes ont le mérite de donner aux « monoglottes » accès aux textes en langues étrangères… et de les pousser à faire des efforts pour lire en V.O.
    Il faut bien reconnaître que la tâche n’est pas aisée ; par exemple, traduire fidèlement, clairement et sans lourdeur « He put his hands  on her hair »…

    • Cette réponse a été modifiée le il y a 10 mois et 2 semaines par R.Graymarch.

    "Vé ! " (Frédéric Mistral, 1830-1914)
    " Ouinshinshoin, ouinshinshishoin " ( Donald Duck, 1934)

    #192155
    Tybalt Ouestrelin
    • Pas Trouillard
    • Posts : 549

    Ou « il passa de l’eau » qu’on ne dit jamais en français mais qui est présent dans un chapitre AGOT de Tyrion il me semble.

    DOH 8&10 : Tybalt Ouestrelin, acolyte loyaliste devenu Mestre ; Or, Argent et Bronze.
    DOH 9 : Lazzara zo Ghazîn, Grâce Bleue devenue Sénéchale. Miraculée devenue Conseillère. Pas Miraculée deux fois.

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